«Aladin la salua avec joie.» Virginia Frances Sterrett, 1928.
Anonyme - Aladin tiré des Mille et une nuits, tome III
Pour obtenir une lampe qui lui donnera tous les pouvoirs, un magicien doit trouver un jeune garçon qui se chargera de descendre dans une certaine caverne, pour la prendre et la lui donner. Il compte bien se débarrasser de cet intermédiaire, une fois qu’il aura la lampe. Il cherche dans les rues d’une capitale de la Chine, un enfant malin, un peu voyou et c’est Aladin qu’il choisit en se déclarant son oncle, pour le mettre en confiance. Aladin descend dans la caverne remplie de trésors : il trouve la lampe, mais refuse de la donner au magicien avant d’être sorti. Le magicien l’enferme, croyant que la caverne serait son tombeau. Aladin y reste trois jours dans le noir, sans boire et sans manger. Mais, grâce à un anneau auquel est attaché un génie et que le magicien lui avait donné pour le protéger, Aladin revient chez lui emportant la lampe. Voulant aller la vendre pour se nourrir lui et sa mère, celle-ci la nettoie, et en la frottant, fait surgir un génie qui a le pouvoir d’exaucer tous les vœux. Grâce à la lampe, Aladin pourra prétendre épouser la princesse dont il est tombé amoureux. Mais la lampe est convoitée par le magicien et son frère qui chercheront tour à tour à la lui reprendre. Tous deux seront exécutés. Aladin finit par triompher de ces épreuves et gagne amour et fortune.– feeries.revues.org
Tout le monde connaît dans les grandes lignes l'histoire d'Aladin ou la lampe merveilleuse, conte tiré des Mille et une nuits. Ces contes sont transmis de génération en génération par tradition orale et sont fixés par écrit à partir du XIIIe siècle seulement. Il est impossible de nos jours de savoir avec certitude l'auteur, le contexte exact et la date de ces contes. Il est toutefois à noter qu'Aladin est un ajout tardif aux Mille et une nuits et qu'il ne faisait donc pas parti des contes originaux composant ce recueil. On peut diviser cette histoire en plusieurs parties :
-Une introduction où nous sont présentés Aladin, sa famille et leur quotidien.
-L'arrivée du magicien africain, son choix d'Aladin pour l'exécution de son plan, toutes ses manigances pour enjôler Aladin et sa mère, faire taire leurs soupçons et convaincre Aladin de pénétrer dans la grotte pour aller chercher la lampe. Finalement l'échec de son plan et l'abandon d'Aladin dans la grotte.
-Aladin découvre les pouvoirs de l'anneau que lui a donné le magicien et peut ainsi sortir de la grotte et rentrer chez lui. Ayant décidé de vendre la lampe pour les nourrir lui et sa mère, il découvre le Génie de la lampe et fait des vœux qui permettent de subvenir à leurs besoins essentiels. Cette étape dure plusieurs années durant lesquelles Aladin acquiert connaissances et expériences de la vie.
-Aladin rencontre la princesse Badroulboudour, fille du Sultan, et en tombe amoureux. Il se sert alors des pouvoirs de la lampe pour se débarrasser de son rival et convaincre le Sultan qu'il est digne d'épouser la princesse.
-Retour du magicien africain qui kidnappe la princesse et manque de peu de faire décapité Aladin par le Sultan en furie. Aladin tend un piège au magicien et réussi à ramener la princesse à son père le Sultan.
-Le magicien a cependant un frère, tout aussi machiavélique et également magicien, qui n'a plus qu'un seul but : venger son frère et réussir à éliminer définitivement Aladin. Aladin parvient à déjouer ses plans. Pour la finale, happy end et vie longue et prospère pour Aladin et la princesse Badroulboudour.
L'histoire, habillement contée par Shéhérazade, arrive à maintenir notre intérêt tout au long du récit. Aucun temps mort, les différentes aventures d'Aladin s'enchainent bien, séparées et amenées par de rapides transitions.
Ce conte fait partie de l'imaginaire collectif et nous en avons tous vu plusieurs interprétations au cours de notre vie. Des films, des livres pour enfants, des images et le fameux film d'animation de Disney. Toutefois, lire la version contenue dans les Mille et unes nuits amène son lot de différences et vient casser quelques mythes.
-Aladin n'est pas un personnage super génial. En effet, au début du conte, on nous présente un Aladin paresseux qui passe son temps à jouer avec ses amis sur les places publiques. C'est d'ailleurs ce qui le fait repérer par la magicien africain. Il est têtu, n'écoute pas ses parents, n'est pas reconnaissant des efforts qu'ils fournissent pour le faire vivre, ne veut faire aucun effort, ne veut pas apprendre de métier. Il rêve d'une vie oisive et faite d'argent facile. Il est inconscient et ingrat. Par la suite, tout ce qu'il a et tout ce qu'il réussi, ou presque, lui vient du Génie de la lampe. Les seuls points positifs qu'on peut lui accorder sont qu'il fait des voeux qui sont réfléchis, qu'il fait preuve de générosité envers le peuple (bien que cette générosité ne lui coute rien puisque distribuée à même les richesses fournies par le Génie, et qu'il sait que cette générosité servira plus tard ses propres intérêts), qu'il s'illustre dans une vague bataille et qu'il se montre parfois ingénieux.
-L'histoire se déroule en Chine. Pas en Arabie saoudite ou ailleurs au Moyen-Orient.
-Loin de la version de Disney, il y a des meurtres dans Aladin. Empoisonnement, strangulation et arme blanche sont au rendez-vous.
-Point de tapis volant. Cet ajout doit venir d'un autre conte ou d'un autre auteur. C'est pourtant un des éléments qu'on associe le plus à Aladin, mais il ne fait pas parti du conte tel que retrouvé dans les Mille et une nuits.
-Pas de limite de voeux. En effet, au lieu du fameux trois voeux seulement, il n'y a pas de limite et le Génie de la lampe exécute les souhaits du propriétaire de la lampe tant qu'il en demande.
-Étant donné l'âge du conte, les femmes n'ont pas une place extraordinaire dans cette histoire. Plusieurs des ennuis d'Aladin sont dus à l'innocence de la princesse. Mais le conte contient également un bel épisode anti-sémite. Vraiment pas génial comme message.
-Ces gens-là sont vraiment les rois du bling-bling. Tout doit être couvert de perles, d'émeraudes et de diamants pour qu'ils y fassent attention. Tu peux être laid, sale et con, si tes vêtements sont richement décorés, t'es brillant (C'est le cas de le dire...). Voyez vous-même par cet extrait : «...La ceinture dont elle se ceignit n'était qu'or et que diamants enchâssés, les plus gros et les mieux assortis, et elle accompagna la ceinture d'un collier de treize perles seulement, dont les six de chaque côté étaient d'une telle proportion avec celle du milieu, qui était la plus grosse et la plus précieuse, que les plus grandes sultanes et les plus grandes reines se seraient estimées heureuses d'en avoir un complet de la grosseur des deux plus petites de celui de la princesse. Les bracelets, entremêlés de diamants et de rubis, répondaient merveilleusement bien à la richesse de la ceinture et du collier.» Et c'est comme ça pour tout : les vêtements, les bijoux, la décoration intérieure, la vaisselle et même les éléments architecturaux des palais. Tout n'est qu'or, argent, diamants, émeraudes et rubis.
-C'est certain que Jasmine ça clenche plus que Badroulboudour.
Finalement, on ressort de ce conte avec une morale qui ressemble à «avec de l'argent le monde est à toi» ou «inutile d'apprendre un métier ou de se forcer pour apprendre quelque chose, juste à rester à l'affût des possibilités d'argent facile». Bref, lecture intéressante, divertissante, mais morale plus ou moins morale.
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