Avis et opinions bien personnels sur mes lectures et les choses qui tournent autour des livres.
Binet, Laurent – HHhH – 2010.
A Prague, en 1942, deux hommes doivent en tuer un troisième. C’est l’opération « Anthropoïde » : deux parachutistes tchécoslovaques envoyés par Londres sont chargés d’assassiner Reinhard Heydrich, chef de la Gestapo, chef des services secrets nazis, planificateur de la solution finale, « le bourreau », « la bête blonde », « l’homme le plus dangereux du IIIe Reich ». Heydrich était le chef d’Eichmann et le bras droit d’Himmler, mais chez les SS, on disait : « HHhH ». Himmlers Hirn heiβt Heydrich – le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich. Tous les personnages de ce livre ont existé ou existent encore. Tous les faits relatés ont été vérifiés. Mais derrière les préparatifs de l’attentat, une autre guerre se fait jour, celle que livre la fiction romanesque à la vérité historique. L’auteur, emporté par son sujet, doit résister à la tentation de romancer. Il faut bien, pourtant, mener l’histoire à son terme.
Bon…j’ai adoré ce livre. J’ai beaucoup aimé comment Laurent Binet m’a raconté l’Histoire, et par la même occasion un peu de son histoire, l’histoire de son obsession.
Reinhard Heydrich est un malin qui fait rapidement son chemin jusqu’au haut de l’échelle sociale nazie. Il arrive en quelques années à occuper une des positions les plus importantes du parti nazi, le Reichsprotektor de Bohême-Moravie (République tchèque). Grand, blond, intelligent, efficace bureaucrate, féroce et sanguinaire, Hitler voyait en lui le modèle aryen parfait pour l’allemand parfait. Aidé de Eichmann, il mettra au point le programme d’extermination des Juifs d’Europe, la solution finale.
De Londres, les dirigeants des pays envahis et occupés par les Allemands, même en exil, essaient de faire le maximum pour mettre en place et aider la résistance de leur pays. Ils font de leur mieux pour participer, pour obtenir des renseignements ou pour mettre sur pied des missions pour essayer d’affaiblir l’ennemi commun. Des résistants de tous ces pays font route pour l’Angleterre afin d’y être entraîner. Parmi eux, un Tchèque et un Moldave, Jozef Gabcik et Jan Kubis seront parachutés près de Prague pour y mener à bien leur mission, assassiner le Reichsprotektor, le bourreau de Prague, la bête blonde, Reinhard Heydrich.
Pour nous raconter l’histoire de cet attentat, l’auteur alterne entre des chapitres sur les personnes, les lieux et les événements qui mèneront les protagonistes sur ce coin de rue de Prague le 27 mai 1942, et d’autres chapitres où il nous livre ses doutes, sa volonté de nous raconter les faits réels sans rien inventer ou romancer, la découverte des sources qui ont alimenté sa recherche de vérité, son obsession pour l’histoire de ses trois hommes.
Les chapitres sont courts et écrits simplement sans effet littéraire trop lourd. Cette simplicité dans l’écriture laisse place à la lourdeur et à l’horreur du récit. Le souci de vérité de l’auteur et son dégoût pour la romance et les dialogues inventés ne nous éloigne pas des personnages. On déteste Heydrich et on admire Gabcik et Kubis.
J’ai appris beaucoup de choses dans ce livre, je n’avais jamais vu cette guerre sous un angle tchécoslovaque habituée que je suis d’avoir des points de vue français, anglais ou américains. Il n’y a évidemment pas de mots pour décrire le courage et l’abnégation de certains et les horreurs commises par d’autres durant cette guerre. Ce livre est un excellent témoignage d’événements qui doivent être sus. Il constitue également un excellent hommage à tous ces hommes et femmes qui ont donner leur vie pour combattre ces hommes assoiffés de sang, aveugles et sourds à tout bon sens, à tout remord. On dit que ce n’est pas humain, malheureusement au contraire, ce n’est que ça, humain.
Lu en 2011.